3. NOS SOUHAITS ET PROPOSITIONS POUR LE PATRIMOINE ANTIQUE AIXOIS

SOMMAIRE
3.1. Pour l’oppidum d’Entremont
3.2. Pour le théâtre romain et ses abords
3.3. Pour un musée archéologique
3.4. Pour un circuit archéologique balisé dans la ville d’Aix

3.1. POUR L’OPPIDUM D’ENTREMONT

(dernière mise à jour de cette page : 14 février 2023)

Pour savoir ce qu’est l’oppidum gaulois d’Entremont à Aix, voir la section 4.1.

L’intérêt du site

Du point de vue de la science archéologique, l’oppidum d’Entremont (qui date principalement du 2e s. avant J.-C.) est un site majeur pour l’histoire du sud de la France avant la conquête romaine et il a donné lieu à de très nombreuses publications. 

Mais il est également de plus en plus connu du grand public, en France et à l’étranger. En effet, les guides touristiques le signalent et un site Internet du ministère de la Culture (récemment remanié pour le rendre plus aisé à consulter) le présente de façon riche et attrayante : http://www.entremont.culture.gouv.fr
De son côté, depuis 1993, notre association édite un guide détaillé à l’usage du visiteur, fréquemment réédité et mis à jour ; la dernière édition date de septembre 2019 (voir ici à la rubrique 2.5.2). 

Pour le public, l’attrait de ce site est double. D’une part, il peut y visiter les vestiges de la ville gauloise (remparts, habitations, ateliers… et les traces laissées par la coutume gauloise des « têtes coupées »), d’autre part, il peut se promener dans l’agréable parc de verdure qui englobe l’oppidum (mais il est interdit d’y pique-niquer à la suite du mauvais comportement de certaines personnes qui abandonnaient leurs déchets sur place). 

D’une manière générale, valoriser le patrimoine français pour favoriser le tourisme (en l’occurrence le tourisme culturel) est un objectif que les autorités devraient considérer comme une priorité dans un monde où il apparaît de plus en plus clairement que toutes les ressources nationales sont importantes pour renforcer notre indépendance.

La situation actuelle pour le visiteur

Elle n’est pas satisfaisante. C’est la Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC) de Provence-Alpes-Côte d’Azur, représentante de l’État auquel appartient le site, qui détermine les conditions d’accès et doit entretenir les vestiges, mais jusqu’à maintenant elle s’est peu souciée de l’exploitation touristique et culturelle de ce site pourtant classé « monument historique » depuis 1980. Même le Centre des Monuments Nationaux, établissement public qui a vocation à s’occuper de l’exploitation touristique et culturelle des monuments appartenant à l’État et qui a des bureaux justement à Entremont, n’a jamais rien fait pour ce site. C’est d’ailleurs cette situation qui explique que l’entrée sur le site soit gratuite : la rendre payante supposerait en contrepartie des aménagements qui n’existent pas actuellement. 

1) L’accès au site se fait, à partir de la route D14 d’Aix à Puyricard, par un chemin à voie unique, très sinueux et mal entretenu. Heureusement il y a à l’entrée de l’oppidum un grand parking gratuit. D’autre part, il existe un projet de transformation importante des voies de circulation dans ce secteur (échangeur de la voie rapide RN296) qui devrait améliorer la situation… s’il se réalise, parce que ça fait 30 ans qu’on l’attend !

2) La desserte par les bus urbains (arrêt « Entremont ») est très insuffisante, surtout le dimanche (voir le site Internet https://www.aixenbus.fr).

3) Le nombre de jours d’ouverture n’a cessé de se réduire depuis 2012 : désormais (en 2020) le site est fermé presque un jour sur deux : tous les mardis, certains jours fériés, la plupart des week-ends — alors que c’est bien sûr en week-end que la fréquentation potentielle du site est la plus importante ! — et à d’autres dates plus ou moins imprévisibles (voir ici rubrique 4.2.1).

4) Actuellement le domaine d’Entremont est divisé en trois parties : 
— la première, à l’intérieur de l’oppidum, assez réduite et clôturée, est réservée aux archéologues et comporte quelques bâtiments datant de la deuxième guerre mondiale que les archéologues utilisent comme dépôts techniques. Ces bâtiments empêchent toute fouille sur leur emprise.
— la seconde, clôturée mais en accès libre pour le public aux heures d’ouverture de l’oppidum, comprend la principale zone fouillée où se déroulent les visites, la partie non fouillée de l’oppidum traitée en parc de verdure et une zone hors de l’oppidum qui est aussi un parc de verdure.
— la troisième est une pinède non clôturée hors de l’oppidum, en accès libre permanent, le long de la route D14.

5) Les vestiges ne sont pas suffisamment entretenus et se détériorent à cause des intempéries, notamment des pierres qui ont une valeur particulière (stèles, seuils…).

Stèle du portique aux crânes, près de la tour 2, qui se délite.
Seuil de la pièce 11,4 en 1959 (photo Ambard).
Le même seuil en 2011 (photo Charrière).

6) Les fouilles sont quasiment arrêtées depuis le milieu des années 1990 (un chantier en 1999, le suivant et dernier en 2009) alors qu’il existe, dans la zone fouillée, quelques endroits non encore explorés dont on attend des informations très importantes.

7) Il n’existe aucun local d’accueil où les visiteurs pourraient trouver des informations, pas de point d’eau potable (alors qu’en été la chaleur dépasse souvent 35°C) et pas de toilettes.

Ce que nous souhaitons

Depuis sa création en 1967 notre association a fait beaucoup de choses :
— pour aménager le site, par exemple, à partir de 2000, en installant de nombreux panneaux explicatifs, à nos frais bien entendu. Voir la section 2.7.
— pour le préserver contre un environnement urbain envahissant, par exemple, en 1987-1988, en participant activement à une lutte associative réussie pour limiter le nombre de maisons dans la ZAC Branguier-Marguerite, au sud-est de l’oppidum.
— pour le faire connaître, en publiant l’unique guide disponible (voir section 2.5) et en proposant au public, depuis 1968, un total de plus de 500 visites guidées (voir la section 2.8). 

Mais nos moyens limités ne nous permettent pas de grands projets et d’ailleurs la DRAC ne semble pas y tenir, pour des motifs qui nous échappent un peu, peut-être parce qu’elle craint qu’un afflux de visiteurs soit néfaste à la conservation du site, alors qu’en réalité les intempéries, notamment le gel, créent beaucoup plus de dommages que les visiteurs.

Mais comme ni la ville d’Aix, ni la Métropole Aix-Marseille Provence ne veulent engager des dépenses pour ce site qui ne leur appartient pas, nous nous obstinons à exhorter l’État, propriétaire du terrain, à engager un plan pluriannuel de travaux substantiels.

Des propositions pour une première étape

Nous souhaitons qu’il entreprenne rapidement les améliorations suivantes pour lesquelles nous pouvons éventuellement apporter une petite contribution financière.

1) Créer un chemin piétonnier d’environ 200 m seulement, le long de la route D14, dans la pinède située sur le flanc sud-ouest de l’oppidum, sur le terrain de l’État. Cela permettrait une approche du site sécurisée et plus agréable que de marcher sur le bord de cette route très fréquentée.

2) Séparer deux zones dans le parc :
— la zone de visite archéologique, clôturée et d’accès payant. Cela suppose la création d’un local d’accueil avec billeterie, toilettes, point d’eau potable ; et ce serait mieux d’y prévoir aussi un wifi gratuit et un rayon de librairie.
— la zone de promenade dans la verdure, clôturée elle aussi mais d’accès gratuit

3) Installer quelques bornes d’eau pour le risque d’incendie (il y a eu déjà deux départs de feu au cours des 40 dernières années).

4) Protéger sous un toit les structures antiques les plus fragiles, mettre à l’abri dans un dépôt quelques pierres taillées intéressantes (stèles, seuils de porte, maie de pressoir) et les remplacer sur le terrain par des copies (cela a été déjà fait pour le pilier aux 12 têtes et la stèle aux épis et 16 têtes).

5) Redégager les maisons se trouvant contre la face intérieure du second rempart nord. Ces maisons avaient été fouillées au temps de Fernand Benoit et on y avait dégagé des égouts pluviaux passant sous le sol d’habitation puis sous le rempart. C’était le seul endroit où ce type d’aménagement était visible. De plus, sur tout le champ de fouilles, c’était là que les murs des maisons étaient conservés sur la plus grande hauteur, plus de 2 m, ce qui montrait que ces murs étaient en pierres jusqu’à leur sommet (et non en terre argileuse comme certains l’avaient supposé). Mais au printemps 2021, pour réduire les frais d’entretien du site, les autorités archéologiques régionales ont fait réenfouir ces maisons presque jusqu’à leur sommet.

6) Reconstruire complètement ou partiellement quelques structures antiques pour qu’elles soient plus parlantes :
— un petit tronçon du second rempart nord (courtine et tour) ; l’architecte en chef des monuments historiques n’a-t-il pas reconstruit lui-même il y a plusieurs années, sur 80 cm de haut, une portion de la courtine nord-ouest du premier rempart ?
— une maison dans laquelle on installerait un ou deux mannequins vêtus à la mode salyenne et des fac-similés d’objets usuels (vases, outils…) 

7) Émonder ou couper certains arbres sur le versant sud-est pour rétablir au moins en partie le vaste et magnifique panorama qui avait justifié l’installation d’une table d’orientation devenue aujourd’hui peu utile à cause de la croissance des arbres. Certains de ces arbres poussent sur le domaine de l’État et c’est donc une opération administrativement assez simple. D’autres poussent sur des terrains privés et là il faut convaincre les propriétaires en les subventionnant.

8) Ouvrir l’oppidum tous les week-ends. Nous sommes certes tout à fait conscients des contraintes budgétaires actuelles, c’est pourquoi nous avions proposé au SRA de fermer le site le matin en semaine durant la mauvaise saison, ce qui aurait dégagé des heures pour l’ouverture tous les week-ends ; on pourrait aussi envisager la fermeture du site tous les lundis (en plus du mardi), ce qui donnerait deux jours consécutifs de repos hebdomadaire à l’agent de surveillance en échange des week-ends travaillés. Bref, on pouvait étudier diverses possibilités mieux adaptées aux besoins, mais nos suggestions n’ont pas été jugées recevables. 

Dans une deuxième étape

Nous proposons des actions plus ambitieuses :

a) Construire un dépôt archéologique et un laboratoire d’étude à côté du domaine de l’État. En effet les bâtiments modernes qui se trouvent dans la zone archéologique (construits pour l’armée allemande pendant la 2e guerre mondiale et qui servent depuis 1972 aux archéologues), doivent être détruits pour permettre la fouille là où ils s’étendent. Naturellement, cela n’est possible qu’après la construction de bâtiments de remplacement hors de l’oppidum mais à proximité. Il faudrait donc que l’État acquière le terrain limitrophe du domaine d’Entremont du côté nord-ouest, d’une surface d’environ un hectare, en friche depuis plus de 50 ans et classé en zone agricole avec interdiction de construire sauf pour des bâtiments à destination culturelle.

b) Créer un grand musée archéologique dans la ville d’Aix. Les découvertes faites à Entremont sont actuellement présentées, partiellement, dans deux salles du musée Granet à Aix. Et, à l’exception de ces deux salles, la ville n’a pas de musée archéologique alors qu’elle détient dans des réserves un fonds archéologique de grande valeur (voir page 3.3). Elle possède même un nombre non négligeable de trouvailles préhistoriques actuellement dans les réserves inaccessibles du Muséum d’histoire naturelle. Un grand musée regroupant tout ce fonds varié (préhistorique, gaulois, romain, grec, égyptien…) serait un atout culturel et touristique important et nous estimons que le meilleur emplacement serait l’enclos de la Seds, sur le côté nord du cours des Minimes, là où ont été découverts les vestiges d’un théâtre romain et d’autres édifices antiques.

c) Enfin, tout en sachant que ce n’est peut-être qu’un rêve, nous proposons la création d’un grand parc archéologique sur des terrains agricoles actuellement en exploitation, limitrophe du domaine d’Entremont du côté nord. Ce parc serait dédié à la période pré-romaine dans le sud-est de la France (depuis l’âge du Bronze) et proposerait aux visiteurs, avec une pédagogie appropriée, des fac-similés de plusieurs vestiges emblématiques de cette période mal connue du grand public. Il servirait ainsi à la fois de foyer culturel et de vitrine pour les vrais sites de cette période. La réalisation de ce parc pourrait être l’œuvre conjointe de l’État, des collectivités territoriales et pourquoi pas de structures privées. Elle nécessiterait bien entendu l’acquisition des terres agricoles qui se trouvent entre l’oppidum et la RN 296. Il y a là environ cinq hectares, où la ZPPAUP d’Entremont permet des constructions à but culturel.
Nous avons proposé cette idée de parc pour la première fois au début des années 1990 à la municipalité aixoise avec un dossier réalisé par un architecte, sans succès. Nous pensons pourtant qu’elle mérite réflexion. Nous savons bien que c’est un projet coûteux, aussi le proposons-nous seulement après les priorités précédentes. Mais nous pensons que cette réalisation serait un atout supplémentaire du tourisme en Pays d’Aix.